Mobilisation contre la démolition de maisons médiévales à Alençon

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Alors qu’une grande partie de la France est à l’arrêt, les démolisseurs tentent de poursuivre leur vandalisme. Nous allons finir par croire que la destruction est un secteur économique « essentiel »…
C’est à Alençon, le chef-lieu de l’Orne, que mardi prochain sont menacées de destruction deux maisons médiévales à pan de bois, au 13 et 15 rue du Château, et peut-être deux autres, aux numéros 9 et 11. Un scandale en temps normal, un scandale inimaginable en ces temps de coronavirus.


1. La série des maisons frappées par l’arrêté de péril imminent
Photo : Jean-David Desgeorges
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1. Alors que l’épidémie devrait inciter à retarder toutes les opérations non indispensables, comment peut-on autoriser ce type de travaux quand ceux de la restauration de Notre-Dame ont été interrompus ?
2. La démolition est imposée par un maire, Emmanuel Darcillac (La République en Marche) qui n’a plus aucune légitimité : en ballotage très défavorable, il est arrivé troisième au premier tour, avec seulement 20,8 % des suffrages exprimés, il ne devrait plus être aux affaires ; seul le report du second tour le laisse à la tête de cette ville encore quelques semaines ou quelques mois, mais il devrait se contenter de gérer les affaires courantes.
3. Les maisons ont un véritable intérêt patrimonial ; comme l’a démontré l’historien Jean-David Desforges, historien de l’art et archéologue, sur le site des Amis du Vieil Alençon, il s’agit de maisons du XIVe siècle, à pans de bois, frappées d’alignement au XVIIIe siècle ce qui a entraîné la reconstruction de leurs façades, avec les matériaux et dans le style d’origine. Il s’agit donc d’un exemple à la fois très intéressant, et très pittoresque de maisons médiévales dont l’essentiel est conservé, et la façade refaite au XVIIIe siècle.
4. Ces maisons font partie d’un ensemble, qui rend la rue assez homogène, une autre maison (dite des Sept Colonnes), plus grande mais du même type (ill. 2), située de l’autre côté de la rue, étant même inscrite monument historique, et venant d’être restaurée.
5. L’urgence de détruire ne semblait pas avérée selon les défenseurs du patrimoine.


2. La maison des Sept Colonnes (avant restauration)
Photo : Romain Bréget (CC BY-SA 3.0)
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Bien que la DRAC n’ait pas répondu à nos sollicitations, il est avéré que l’Architecte des Bâtiments de France avait donné son accord à cette destruction, demandant juste de « prendre des photos pour conserver une mémoire de ces bâtiments [1] » (!), bien que les maisons en question soient dans le périmètre de protection de la maison protégée. Il faut dire que la loi Élan, voulue par Emmanuel Macron, donne à l’élu LREM toutes les armes nécessaires pour vandaliser sa ville : il suffit en effet d’un arrêté de péril imminent pour que l’ABF n’ait, en réalité, plus grand chose à dire contre une démolition. Voilà un exemple précis de l’application de cette loi scélérate due au gouvernement d’Édouard Philippe.

L’arrêté affiché aujourd’hui 9 avril
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La mobilisation intense des associations sur Twitter, couplée au lancement d’une pétition (à signer ici), et probablement à l’intérêt de la presse pour cette affaire, a peut-être payé, mais il est possible que la mairie pratique un double langage. Elle a en effet publié hier un communiqué indiquant qu’il s’agirait seulement d’installer une couverture provisoire et de purger les éléments intérieurs effondrés. Elle précise même que « dès le mois de mai, la Ville engagera la réflexion sur le devenir de cet ilôt qui n’est pour l’heure concerné par aucune démolition. »
Sauf que nous avons des témoignages précis, notamment celui de Jean-David Desforges (à qui un agent de la ville confirmait la démolition le 15 mars) qui montrent que la démolition des deux maisons était bien prévue. Les riverains ont été informés le 7 avril de ce chantier de démolition, et la nécessité de garer les voitures ailleurs « pour laisser la place à la grue et à l’évacuation des décombres des maisons [2] ». Aujourd’hui même d’ailleurs a été affiché un arrêté (ill. 3) extrêmement ambigu et flou, qui peut tout à fait permettre une démolition complète.

Il faut que le maire d’Alençon soit bien conscient d’une chose : nous avons bien pris en compte son engagement à ne pas détruire ces maisons et à engager une réflexion sur le devenir de cet îlot. Rien d’autre qu’une réhabilitation ne peut être acceptable. Comme le démontre celle de la maison des Sept Colonnes, celle-ci est parfaitement possible. On ne peut plus accepter, en 2020, la démolition de maisons anciennes de cette qualité.

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