Emmanuel Grégoire confond le pont Alexandre III avec la Concorde, et la Concorde avec un champ de foire

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1. Un des panneaux présentant
le « Concorde Park »
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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La place de la Concorde, considérée par les historiens de l’architecture comme l’une des plus belles places du monde, est maltraitée depuis des années, comme nous le dénonçons ici régulièrement depuis la première élection d’Anne Hidalgo en 2014. Après la fin dans la douleur de la belle amitié entre la maire et Marcel Campion, et le départ définitif de la grande roue, on aurait pu espérer que la place allait enfin être épargnée. Mais c’était sans compter sur la bêtise, l’inculture et la haine de Paris de cette municipalité, incapable de comprendre la beauté de ce lieu et son importance historique. Son état, s’il s’est un peu amélioré grâce aux restaurations des fontaines et de quelques statues de villes, reste désastreux [1]. La mairie n’y voit qu’un champ de foire sur lequel elle peut installer n’importe quoi, et elle ne s’en prive pas.


2. Terrain de basket place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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3. Circuit (à trottinette ? à skate ?
à autre chose ?) place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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Celle-ci est donc, avec constance et régularité, occupée par d’innombrables structures « provisoires » pour abriter tel ou tel événement n’ayant rien à faire ici (fanzone de la coupe du monde de rugby, forum de l’emploi, stade olympique, etc). Elle est par ailleurs menacée à plus long terme par la volonté de réaménagement lourd que porte la mairie, après les Jeux Olympiques, dont des vidéos et visuels plus délirants les uns que les autres ont été publiés dans la presse.


4. Objet non identifié place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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5. Quand Emmanuel Grégoire confond
le pont Alexandre III et la place de la Concorde
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6. Blocs de béton place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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Mais en attendant les JO, le premier adjoint Emmanuel Grégoire s’est aperçu que la place était miraculeusement épargnée par des événements pendant deux mois. Comme il l’a déclaré à Ouest-France : « On avait deux mois de transition entre les deux événements, il aurait été dommage de ne pas en profiter ». L’élu, qui croit que la place de la Concorde est un terrain vague ayant vocation à accueillir n’importe quoi, a donc décidé d’y installer, du 27 décembre 2023 au 25 février 2024 « une nouvelle expérience sportive inédite, au cœur de la capitale ». Et comme il pense probablement que la langue française est très surfaite, il l’a appelée « Concorde Park » (ill. 1). Cela consiste en quelques misérables aménagements « sportifs », terrain de basket (ill. 2), circuits pour trottinettes et skates (ill. 3) ou équipement dont on peine à comprendre le rôle (ill. 4)… Pour fêter le début de cet événement inouï, le premier adjoint a même tweeté en montrant un vélo s’élevant dans le ciel devant… le pont Alexandre III (ill. 5). Quand on dit qu’ils ne connaissent pas Paris, ils ne le connaissent vraiment pas.


7. Stockage de barrières de chantier
place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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8. Bitume déposé sur les pavés
place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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9. Sol défoncé place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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Nous nous sommes rendu sur place hier, mercredi après-midi, jour où les enfants n’ont pas école et pourraient donc se ruer sur ces attractions merveilleuses imaginées spécialement pour eux. Les petits ingrats n’ont aucune reconnaissance : malgré le soleil, les terrains de jeux étaient vides ou presque. Mais la place ne l’était pas, outre que certaines parties sont défoncées (ill. 6) : on y voit toujours ces superbes blocs de béton (ill. 7) dont certains sont tagués, des barrières de chantier y trainent un peu partout (ill. 8), du bitume a été ajouté sur les pavés (ill. 9) pour installer les « attractions » qui sont à la fête à Neuneu ce que celle-ci est à Disneyworld, on y voit plusieurs containers et containers/baraques à frite (ill. 10 et 11) et elle est occupée par de nombreux camions (ill. 12 et 13), transformant ainsi l’œuvre de Gabriel et Hittorf en parking pour routiers. Rappelons que les auteurs de ce désastre sont les mêmes qui dénoncent régulièrement l’« autoroute » que serait la place de la Concorde.


10. Barrières en bois et container
place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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11. Container (et stockage de barrières de chantier) place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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12. Camions garés sur une aire d’autoroute
sur la place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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13. Camions garés sur une aire d’autoroute
sur la place de la Concorde
Photo : Didier Rykner (11/1/24)
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Imaginons la place Saint-Pierre à Rome, la place Saint-Marc à Venise ou la place Major de Salamanque traitées de la sorte. Non, nous ne pouvons pas l’imaginer, car c’est inimaginable. C’est pourtant ainsi que la mairie de Paris transforme sa ville, car évidemment la place de la Concorde n’est qu’un exemple parmi tant d’autres de la disparition de Paris, sous le regard éteint du ministère de la Culture. Il n’y a pas de mots capables de qualifier cela, ou plutôt si, mais nous ne pouvons pas les employer ici...

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