Quand la ministre de la Culture menace la Joconde

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Léonard de Vinci
Mona Lisa, dite La Joconde, vers 1503-1519
Huile sur panneau - 77 x 53 cm
Paris, Musée du Louvre
Photo : C2RMF
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« Pourquoi s’interdire, euh, cher Jean-Luc Martinez, c’est un exemple, déplacer la Joconde [1]… ou la tapisserie de Bayeux ! » L’amateurisme satisfait de Françoise Nyssen tient tout entier dans cette petite phrase. Non contente, alors qu’elle devrait être la première à s’inquiéter de la possibilité réelle de déplacer la tapisserie de Bayeux (voir l’article), de valider cette idée saugrenue, elle en rajoute encore en évoquant rien moins que le prêt de la Joconde.

Or, cette question du déplacement du tableau de Léonard de Vinci a été discutée depuis longtemps, entre scientifiques et responsables de collections, au sein même du musée du Louvre, et la décision prise il y a déjà de nombreuses années est sans appel. Pour des raisons de conservation, la Joconde ne peut bouger et ne doit pas être prêtée, où que ce soit. C’était, en tout cas, la politique jusqu’à maintenant, qui allait d’ailleurs bien au delà puisque la Joconde ne sort même pas de la salle qui l’abrite d’habitude et où elle n’est qu’une fois par an sortie de son caisson pour être examinée.
Un article du Parisien du 25 juin 2011 résume la position du Louvre qui venait alors de refuser le prêt de l’œuvre à la ville de Florence. « Si on ne prête pas la Joconde, c’est parce qu’elle est extrêmement fragile et qu’un voyage risquerait de lui causer des dommages irréversibles » affirmait alors le directeur du département des peintures Vincent Pomarède.
Celui-ci était encore plus précis dans Le Figaro, dans des propos recueillis par Eric Bietry-Rivierre le 4 juillet de la même année : « Avec le temps, le tableau peint sur un panneau de bois de peuplier très mince s’est courbé et présente une fente nettement visible au dos, côté gauche. Tous mes homologues en France comme à l’étranger savent cela. Même quand nous la décrochons pour son examen annuel, nous ne l’amenons pas au laboratoire, nous l’étudions en salle. Deux heures en dehors de son caisson isotherme suffisent pour constater que sa fente s’élargit. »

Selon donc les personnes en charge de la conservation de ce tableau, un voyage causerait des « dommages irréversibles ». Voilà sans doute pourquoi on ne déplace plus la Joconde. Qu’une ministre de la Culture ose proposer en souriant le contraire démontre simplement qu’elle n’est vraiment pas à sa place. Il semble d’ailleurs qu’on l’ait compris en haut lieu puisque d’insistantes rumeurs (glanées auprès de plusieurs sources) parlent d’un probable remplacement dans les mois à venir.

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