Chroniques préélectorales du patrimoine parisien (1)

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 La scandaleuse implantation d’un Grand Palais « temporaire » sur le Champ de Mars, devant l’École Militaire, jusqu’à la fin des Jeux Olympiques, aurait pu au moins avoir l’avantage de nous débarrasser une fois pour toute de l’horrible « Mur de la Paix » de Clara Halter (ill. 1), monument demeuré en place illégalement dans le périmètre de protection de l’École Militaire, d’une manière d’autant plus incompréhensible qu’à part Marek Halter, époux de la défunte auteur de cette construction, personne ou presque n’a le mauvais goût de la défendre, pas même les amateurs d’art contemporain.


1. Le « Mur de la Paix » de Clara Halter sur son emplacement au Champ de Mars
Photo : Stone40 (CC BY-SA 3.0)
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Celle-ci sera bien ôtée du Champ de Mars, mais ce ne sera que pour venir ruiner une autre perspective, celle des Invalides. Il a en effet été décidé par la Ville de la transporter place de Breteuil où se trouve le monument à Louis Pasteur d’Alexandre Falguière. L’avenue de Breteuil est déjà en partie dénaturée par des « végétalisations » de pieds d’arbres toutes plus médiocres les unes que les autres. On aimerait savoir s’il y a encore des architectes des bâtiments de France actifs sur Paris où tout et n’importe quoi peut être installé sur la voie publique.
Un point encore : déplacer le « Mur de la Paix » et le remodeler (par Jean-Michel Wilmotte, le même qui construit le Grand Palais éphémère) va coûter 1,5 millions d’euros…


2. Panneau installé près de l’église Saint-Séverin (monument historique)
Photo : @FabienTipon
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3. Panneau installé sur un trottoir
gênant les passants
Photo : @FabienTipon
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- On se souvient comment la Mairie de Paris avait été condamnée en février 2018 par le Conseil d’État à démonter 1630 panneaux publicitaires, les fameuses « sucettes », pour n’avoir pas mis les entreprises en concurrence. Pendant près de deux ans, Paris avait ainsi été délivré de ces verrues, à la plus grande satisfaction de tous les amoureux de la capitale.
C’et hélas terminé comme on peut désormais le voir dans toute la ville. Les publicités envahissent à nouveau l’espace public, sans égard pour les monuments historiques (ill. 2) ni même pour les piétons (ill. 3). Ce contrat devrait rapporter 170 millions sur cinq ans pour la Ville de Paris, soit à peine 2% du budget [1].


4. Projet (finalement non retenu)
pour la façade de la gare du Nord
© Cabinet Wilmotte
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5. Projet d’aménagement
de la gare du Nord
©Valode et Pistre
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 Nous avions écrit à plusieurs reprises sur la gare du Nord et le projet que Wilmotte (encore lui…) avait prévu, qui défigurait sa façade et son côté ouest (ill. 4). Le projet finalement validé, et dont beaucoup de journaux ont parlé, dû à d’autres architectes (Valode et Pistre), est moins destructeur, il faut le reconnaître. Il l’est pourtant, en coupant la grande nef de Hittorf par une passerelle qui permettra de desservir les quais pour les voyageurs (ill. 5). Pour cette raison, nous y sommes bien sûr opposé. Quant à l’autre raison qui semble faire l’unanimité contre elle, soit la transformation de la gare en un gigantesque centre commercial, cela sort de notre champ. Mais ce qui est drôle, dans cette affaire, c’est de voir soudain la mairie se découvrir protectrice du patrimoine, un patrimoine qu’elle s’emploie un peu partout ailleurs à massacrer ou à négliger. Jean-Louis Missika, adjoint au maire, a signé une tribune dans Le Monde où il écrit que le projet va : « défiguré[er] la gare d’Hittorf ». Être d’accord avec la Mairie de Paris (et avec l’architecte Dominique Perrault, co-auteur d’une autre tribune dans Le Monde) sur une question patrimoniale est particulièrement savoureux. Pour une fois, nous ne pourrons que les soutenir. Et à nouveau nous demander ce que fait le ministère de la Culture incapable de protéger un monument comme la Gare du Nord.

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